Le legs de l’histoire - Fondation Res Publica

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Le legs de l’histoire

Intervention de Bertrand Dutheil de la Rochère, membre du conseil scientifique de la Fondation Res Publica, au colloque du 24 novembre 2008, L'Avenir des Balkans. 

Source : Fondation Respublica Colloque "L'avenir des Balkans " 24 novembre 2008

 
Le legs de l’histoire
 
Au début des années de 1870, le baron de Kallay, orientaliste hongrois, publia une Histoire des Serbes, dans laquelle il affirmait que tous les Slaves de Bosnie-Herzégovine étaient des Serbes quelle que fût leur religion. Les orthodoxes, bien sûr, mais aussi les catholiques et les musulmans. En 1882, le même baron de Kallay fut nommé par François-Joseph administrateur de la Bosnie-Herzégovine. A peine arrivé dans son nouveau poste, à Sarajevo, il fut obligé d’interdire la vente de son propre livre tellement les catholiques, les Croates, étaient indignés par les affirmations de ce livre. Il resta administrateur de la Bosnie-Herzégovine jusqu’à sa mort en 1903 et fut sûrement un des premiers qui posa la question de l’existence d’une nationalité musulmane slave. 

Cela montre qu’il faut, lorsqu’on aborde la question des nationalités dans les Balkans, être extrêmement prudent, il faut y aller sans préjugés, sans idée arrêtée et essayer de comprendre quels sont les véritables problèmes. 

Pour le géographe, les Balkans se trouvent au sud de la ligne de partage entre les empires romains d’Orient et d’Occident, telle que délimitée par Dioclétien – lui-même d’origine dalmate - en 293 avec la Tétrarchie, dont le tracé fut à peu près repris à la mort de Théodose le Grand, en 395, pour devenir définitif. 

Pour l’historien, il faut y ajouter toute l’ancienne Yougoslavie et sûrement une partie de la Roumanie, au moins la Valachie c’est-à-dire la région de la Roumanie qui se trouve entre les Carpates et le Danube avec Bucarest. 

La particularité de cette région est que la religion est un élément constitutif du sentiment d’appartenance collective. L’origine s’en trouve dans l’ecclésiologie orthodoxe qui repose sur la pentarchie patriarcale (Rome, Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem), s’opposant à la monarchie pontificale de Rome. Elle conduit à l’éclosion d’Églises nationales. De plus, la théologie césaro-papiste implique une intrication entre le politique et le religieux. Il n’existe pas de meilleure définition du césaro-papisme que celle donnée par un théologien russe, Joseph de Volotsk, à la fin du XVe siècle : « Si la personne du souverain est de nature humaine, son pouvoir est d’essence divine. » Le césaro-papisme n’est donc ni la théocratie, ni l’absolutisme. 

Je crois nécessaire à partir de là de rappeler quelques définitions qui expriment des enjeux politiques et historiques essentiels. 

L’autocéphalie est la possibilité pour une Église, sur des critères qui peuvent être géographiques ou ethniques, de nommer elle-même ses propres évêques, y compris son primat. La recherche de l’autocéphalie d’une Église orthodoxe, aux XIXe et XXe siècles, fut déterminante pour affirmer l’existence de la nation correspondante. 

La dernière Église proclamée autocéphale, avant 1990 fut l’Église orthodoxe de Macédoine. La Macédoine a été reconnue comme nation et comme république lors de la constitution de la Yougoslavie socialiste, en 1945, et le régime titiste, alors qu’il s’attaquait aux différentes Églises dans le reste de la Yougoslavie, favorisa l’émergence de cette Église autocéphale de Macédoine afin d’affirmer l’existence d’un peuple macédonien. En 1959, sous la pression du pouvoir, l’Église serbe accorda à l’archevêché d’Ohrid l’autonomie en tant qu’Église macédonienne. Celle-ci se déclara autocéphale en juillet 1967. Elle ne fut reconnue par aucune autre Église orthodoxe. 

En 1906, le recensement ottoman en Macédoine constitue un autre exemple. La région englobait, alors, outre la Macédoine d’aujourd’hui, dite Macédoine du Vardar, la Macédoine du Pirin, qui correspond au sud-ouest de l’actuelle Bulgarie, et la Macédoine égéenne, qui correspond au nord-centre de la Grèce. 
On y a recensé notamment des musulmans, des patriarchistes, des exarchistes. « Patriarchistes » renvoyait au patriarcat de Constantinople et donc à ceux qui se déclareront plus tard grecs. « Exarchistes » renvoyait à l’exarchat bulgare de Constantinople donc à ceux qui ultérieurement se déclareront bulgares. 

Les Ottomans ont renforcé la conception orthodoxe de l’appartenance collective avec le système des millets. D’un côté l’Oumma, l’ensemble des musulmans sous la direction du Calife et de l’autre côté, les religions qualifiées du livre qui avaient leur propre système d’organisation, non seulement religieuse mais civile : le droit civil et pour partie le droit pénal dépendaient du millet (du milletbasi, comme disaient les Turcs, de l’ethnarque - chef de l’ethnie - en grec). 

Le premier millet fut le Rum Millet, le millet des Romains, donc des Byzantins, donc des orthodoxes, instauré tout de suite après la prise de Constantinople par Mehmed II, en 1453, lorsqu’il nomma Gennadios II Scholarios patriarche de Constantinople. Gennadios appartenait à ces orthodoxes qui pensaient qu’ « il valait mieux le turban turc que la mitre latine ». Le millet orthodoxe recouvrait toutes les populations orthodoxes quelles que fussent leurs langues : le grec, une langue slave, l’albanais ou le roumain. 

D’autre part, à partir de 1461, fut instauré le millet arménien avec un patriarcat à Istanbul, mais il concerne moins la zone qui nous intéresse puisqu’il étendait sa juridiction sur les chrétiens monophysites et nestoriens, habitant surtout en Asie mineure et au Proche et au Moyen Orient. 

Enfin, le millet juif sous l’autorité de l’Hakham Bachi vit son importance accrue par l’arrivée des Juifs d’Espagne, Salonique, notamment, fut dès 1518 une ville à majorité juive. 

Du côté musulman, fut important le phénomène des mouhadjirun. Un mouhadjir est un musulman qui quitte la région qu’il habite parce qu’elle est désormais dominée par une autre religion. Les mouhadjirun commencèrent à quitter l’Europe centrale dès la fin du XVIIe siècle. D’autres quittèrent le Caucase avec l’avancée russe tout au long du XIXe siècle. Certains de ces derniers furent installés en Macédoine ou en Bulgarie. Encore aujourd’hui, dans quelques villages, on parle le tcherkesse, cette langue du Nord-Caucase. De même en 1913 lorsque la Crète fut rattachée à la Grèce, les populations hellénophones musulmanes, surtout des pêcheurs, embarquèrent sur leurs bateaux pour aller s’installer sur les côtes d’Asie mineure. 

Il faut ajouter les massacres qui, des deux côtés eurent lieu au moment des guerres d’indépendance de la Grèce et de la Serbie (dont témoignent le tableau de Delacroix sur « le massacre de Chios », et le poème de Victor Hugo sur « l’enfant grec qui voulait de la poudre et des balles »). Les Russes furent plus sensibles au fait que le patriarche de Constantinople avait été pendu devant sa cathédrale. Mais les musulmans du Péloponnèse, ceux du nord du Golfe de Corinthe, ceux de Serbie, furent expulsés, massacrés. Les chiffres diffèrent selon les historiens, selon surtout leur nationalité. Ceci explique qu’aujourd’hui il n’y a plus de musulmans dans le sud de la Grèce, pas plus que dans la Serbie proprement dite, nonobstant tous les problèmes d’urbanisation et de migrations récentes, sauf sur le territoire de l’ancien sandjak de Novipazar (sous occupation militaire austro-hongroise de 1878 à 1908, rendu à la Turquie en 1908 et partagé en 1913 par la Serbie et le Monténégro) où les populations musulmanes se sont maintenues. 

Autre phénomène important : au moment de la guerre d’indépendance de la Grèce, les populations orthodoxes de langue albanaise, les Arvanites, parce qu’elles étaient orthodoxes, ont lutté pour l’indépendance de la Grèce contre l’occupation turque, puis se sont hellénisées, la langue de la liturgie devenant la langue de la culture, puis la langue de tous les jours. L’Église orthodoxe albanaise autocéphale ne fut créée qu’en 1922 et ne fut reconnue qu’en 1937. 

Enfin, la convention de Lausanne du 30 janvier 1923 et le traité de Lausanne du 24 juillet de la même année, prévoyaient qu’un million cinq cent mille chrétiens d’Asie mineure, qu’ils fussent de langue grecque ou de langue turque devaient quitter le territoire qui était désormais celui de la Turquie pour aller s’installer en Grèce et, inversement, un peu moins de cinq cent mille musulmans – de langue grecque, turque, albanaise ou slave – devaient quitter le nord de la Grèce pour s’installer en Asie mineure. 

Deux exceptions importantes : 
Comme les Grecs voulaient maintenir le patriarcat à Constantinople, comme ils voulaient conserver une population grecque dans les deux îles rattachées à la Turquie, Imbros et Ténédos, les musulmans de Thrace occidentale, dans la partie qui avait été bulgare entre 1913 et 1919, furent autorisés à rester, ce qui explique qu’aujourd’hui vivent encore en Grèce 120 000 Turcs musulmans, sans compter quelques musulmans de langue slave. 

A cette définition de la nation par la religion, vient se rajouter une particularité slave : la définition de la nation par l’histoire et par le rattachement à un autre peuple. 

Que sont les Slovènes, sinon des slaves du sud qui ont cohabité pendant presque un millénaire, sinon avec des Allemands, du moins avec des Autrichiens ? 

Qu’est-ce qu’un Croate, sinon l’habitant d’un État entré dès 1102 (Pacta conventa) dans l’orbite de la Hongrie, par une union personnelle confirmée en 1868, au lendemain du compromis austro-hongrois, par un compromis hungaro-croate (auquel vint s’ajouter la Dalmatie qui était effectivement à la Croatie, mais que le roi de Hongrie avait vendue à Venise au cours du XVe siècle) ? 

De même, pour les quatre États slaves orthodoxes du sud : 
À l’ouest, le Monténégro est un État slave qui n’a jamais été dominé par les Ottomans. Les Monténégrins sont si conscients que cette réalité historique constitue leur identité qu’ils en ont fait une clause d’un traité signé avec les Ottomans dès 1799. 
À l’est, les Bulgares : 
Une population slave très tôt dominée par une population turque. Par une fusion progressive, cette population turque (dite protobulgare) a constitué la nation bulgare. 
Les Serbes sont des Slaves directement convertis à l’orthodoxie, puis dominés par les Ottomans. 
Entre les Serbes et les Bulgares, les Macédoniens dominés jusqu’en 1912-1913 par les Ottomans. 

Enfin il est essentiel d’évoquer la conception allemande de la nation (Herder, Hegel, Fichte). Au XVIIIe siècle et surtout au XIXe siècle, ne l’oublions pas, une grande partie des intellectuels des Balkans, sont passés par Vienne avant de venir à Paris. En 1850, à Vienne, des intellectuels serbes et croates ont convenu des règles du serbo-croate, s’écrivant dans les deux alphabets. 

Sans rentrer dans les détails je dirai que la Bulgarie est un bon exemple de cette accumulation de critères pour définir la nation. Le premier combat des intellectuels bulgares au XIXe siècle fut de récupérer l’autocéphalie de l’Église orthodoxe bulgare. Deux fois, au Moyen Âge, l’Église bulgare avait été dirigée par un patriarcat. Il n’en était resté que l’archevêché d’Ohrid, dont l’autocéphalie avait été supprimée en 1767, et dont les titulaires, désormais grecs, imposaient la liturgie en grec, les moines et le bas clergé se battant pour la conserver en slavon. Les historiens bulgares expliquent aujourd’hui que la Bulgarie de cette époque subissait une double oppression, une oppression culturelle grecque et une oppression politique ottomane. Après avoir chassé de force le clergé grec de quelques évêchés, le combat a été gagné en février 1870 avec la création, par le gouvernement ottoman, de l’exarchat bulgare de Constantinople (d’où le terme d’exarchiste que j’ai utilisé tout à l’heure). Le patriarcat le déclara schismatique et ses fidèles furent accusés d’hérésie à cause de leur phylétisme ou nationalisme religieux. 

Il fallut attendre 1945 pour que l’exarchat bulgare soit reconnu par le patriarcat œcuménique. Le traité de Neuilly (27 novembre 1919) prévoyait d’ailleurs la suppression des diocèses exarchistes de Macédoine et de Thrace égéenne, c’est dire l’importance que les Grecs et les Serbes, qui venaient de gagner la guerre, reconnaissaient à ce problème de la religion et de la confession. 

A cette définition de la nation viennent se rajouter les étapes successives du peuplement des Balkans. 
Un mot des Grecs : à partir du XVIIe siècle, les Phanariotes, une cinquantaine de familles, la plupart d’origine grecque, ont dominé le monde orthodoxe sous occupation ottomane, autour du patriarcat œcuménique. Un historien roumain, Nicolas Iorga, qui fut par ailleurs Premier ministre de son pays, situe la véritable mort de Byzance en 1821, au moment où la guerre d’indépendance de la Grèce et la tentative roumaine entraînèrent la disparition des Phanariotes. 

Autre population ancienne : Les Illyriens, devenus les Albanais, en majorité musulmans (70%) mais des musulmans bektachis (une forme du chiisme), des musulmans dont le héros national est un chrétien - renégat qui plus est – Skanderbeg. 

On trouve aussi des Valaques, dont la langue est proche du roumain. Un débat très compliqué oppose pays et historiens sur leurs origines. Pour les uns, il s’agit des descendants de populations autochtones romanisées ; pour les autres, ils ne sont que des bergers roumains qui ont poussé leurs moutons depuis la Valachie. 

Les Slaves sont arrivés à partir du VIe siècle. 

Les Tziganes : Le premier document qui les mentionne en Valachie date de 1385. 
Ils constituent entre 5% et 10% des populations de ces pays. Les chiffres officiels sont souvent faux. En Roumanie, le chiffre officiel est 1,2 %, alors que les sociologues roumains les estiment à 1 million et les associations tsiganes à 2,5 millions, voire à 3, soit 10 % de la population. Ils étaient 10% au XIXe siècle. Ces divergences proviennent du fait que de nombreux Tsiganes se seraient déclarés roumains, hongrois ou turcs et que certains ne possèderaient aucun papier d’identité. 

En dehors de ceux qui résident en Grèce, il reste essentiellement des Turcs en Bulgarie ; Ils forment avec les autres musulmans de Bulgarie (les Pomaks, des Bulgares, plutôt déshérités, convertis à l’islam) environ 12% de la population. Ils ont leur propre parti, le Mouvement des droits et libertés, avec un nombre important de suffrages (en 2005, 33 sièges sur 240). 

J’ai déjà parlé des musulmans du sandjak de Novipazar. En Bosnie, sans entrer dans la question complexe du bogomilisme, et sans avoir le temps d’examiner la question brûlante des variations dans la composition ethnico-religieuse de la population, les musulmans semblent être plutôt des descendants de Croates issus des couches féodales dominantes ou entraînées par elles dans l’islam. 

Une dernière population n’existe plus mais a joué un grand rôle : les Allemands étaient 505,790 (4,22%) dans le royaume de Yougoslavie en 1921. Certains avaient toujours vécu en Slovénie et d’autres avaient été installés en Voïvodine (le nord de la Serbie actuelle) après la reconquête de la fin du XVIIe siècle et du XVIIe siècle. Ils ont été expulsés en 1945. 

Il faut encore considérer les rêves, nombreux, divers et contradictoires. Trois revêtent une certaine importance dans la mesure où ils ont eu un commencement de réalité. 

Le premier était la megali idea (la grande idée), la reconstitution de l’Empire byzantin qui anima les Grecs tout au long du XIXe siècle et qui s’effondra dans l’incendie de Smyrne le 8 septembre 1922. 

Le rêve de la Grande Bulgarie qui, trois fois, a eu un commencement de réalisation : entre mars et juillet 1878, c’est-à-dire entre le traité de San Stefano et le congrès de Berlin. La Grande Bulgarie comprenait la Macédoine actuelle, une partie de la Serbie, toute la Bulgarie, la Thrace occidentale et une partie de l’Albanie. La Grande Bulgarie a trouvé deux autres débuts de réalisation pendant la Première, puis pendant la Seconde guerre mondiale. 

Enfin, le dernier rêve, dont on parlera sans doute beaucoup ce soir, était le rêve yougoslave. Il ne faut pas oublier qu’il fut d’abord un rêve croate, animé par un évêque catholique, Mgr Strossmayer, évêque de Djekovo. En face de lui, une autre partie de la hiérarchie catholique était favorable à la Grande-Croatie. Au moment de la création du royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes, le 1er décembre 1918, Alexandre, prince-régent de Serbie, hésita entre la Yougoslavie et la Grande Serbie, c’est-à-dire la réunion de tous les Serbes, et seulement des Serbes, en un seul État. Très poussé par la France il créa la Yougoslavie et ce fut le début des problèmes que nous connaissons depuis quatre-vingts ans et notamment de ce qui s’est passé sur ce territoire entre 1941 et 1945, et depuis 1991. 


Jean-Pierre Chevènement 
Vous avez magnifiquement résumé la complexité de cette histoire que nous allons nous efforcer de commenter. 

Le problème n’est pas simple, nous venons de le mesurer. Dans les guerres yougoslaves, qui ont éclaté il y a maintenant plus de seize ans, il serait simpliste de chercher à identifier les bons et les méchants. La « communauté internationale » (vocable qui mériterait d’être défini) a entériné un certain nombre de situations : l’indépendance de la Slovénie, d’abord, puis celle de la Croatie qui a ouvert la voie à ce qu’il faut bien appeler une guerre civile même s’il y a une diversité de peuples indéniable. Chacun se souvient des conditions de la reconnaissance de la Bosnie-Herzégovine. C’est là que les choses ont malheureusement commencé. La communauté internationale est intervenue dans les conditions que nous connaissons, par les accords de Dayton qui ont permis, en 1996, de fixer un équilibre au sein de la Bosnie-Herzégovine entre les trois peuples constitutifs, essentiellement la fédération bosno-musulmane d’un côté et la Republika Srpska de l’autre. La Macédoine fut entraînée dans le conflit albano-macédonien auquel les accords d’Ohrid mirent un terme en 2001. L’affaire du Kosovo agita la région dès 1989. En 2008 la déclaration d’indépendance du Kosovo est reconnue par une soixantaine de pays. A l’heure qu’il est, les conditions de conformité au droit international font encore problème. 

Des solutions provisoires ont donc été conçues et ont fini par s’imposer pour mettre un terme à ces guerres qui se sont succédé pendant près d’une dizaine d’années. Ces solutions provisoires durent et la situation dans les Balkans est celle d’une grande panne. Le bilan ne paraît pas extrêmement brillant, qu’on se place du point de vue de la démocratie ou du point de vue du développement. 

C’est quand même la paix, une paix apparente. Sera-t-elle durable ? Je ne saurais me prononcer. La situation paraît d’autant plus grosse de risques que dans les Balkans se cristallisent un certain nombre d’oppositions et que s’équilibrent des rapports difficiles entre la Russie d’une part et ce que je n’ose pas appeler l’Europe occidentale de l’autre (le monde germanique, peut-être le monde anglo-saxon), la France ne sachant pas trop comment se situer ou, en tout cas, abordant avec beaucoup d’incertitude cette question extrêmement difficile. 

Nous sommes en présence d’un problème très compliqué et nous avons demandé, Alain Dejammet et moi-même, à d’éminents spécialistes de nous faire part de leur point de vue. 

Quelles perspectives ? La perspective européenne reste assez floue. Pour la Croatie elle paraît relativement avancée, c’est moins vrai pour les autre pays balkaniques. Le mirage européen compte beaucoup dans l’évolution de la Serbie, je crois qu’un statut provisoire d’association a été imaginé dont bénéficient aujourd’hui la Croatie, la Macédoine et la Serbie. 

Je n’en dis pas plus avant de donner la parole à Monsieur Bertrand de Largentaye.
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